Thursday, June 02, 2005

La méthode

Pour pouvoir exploiter notre corpus nous nous sommes familiarisés avec des techniques linguistiques : l’analyse du discours et la lexicométrie[1]. La première est une méthode du traitement de l’information. Elle porte sur le mode et le fonctionnement des articles de presse dont elle doit faire ressortir les aspects représentatifs d’une part et sur les mécanismes discursifs qui ont conditionnés l’écriture des textes de presse (enjeux subjectifs et sociaux) d’autre part afin de ramener à l’unité d’un « positionnement » une dispersion d’énoncés[2]. La lexicométrie quant à elle permet grâce à un programme informatique de procéder à des calculs statistiques lexicaux pour faire rapidement ressortir les traits représentatifs et significatifs d’un discours délinéarisé[3]. Les ouvrages de Dominique Maingenau, Genèses du discours, L’analyse du discours (introduction aux lectures de l’archive), Analyser les textes de communication, le programme informatique LEXICO 3 ( la lexicométrie est une approche statistique vouée à délinéariser les textes politiques[4]) que nous donné André Salem et le livre La sémantique de Christian Touratier nous ont permis d’élaborer une connaissance de plus en plus précise du discours et de son traitement.
Ensuite, une étude du contexte (psychologique, social et historique)[5], de la propagande et de l’élaboration du discours journalistique général et particulier aux Straßburger Neueste Nachrichten (SNN) nous ont été non seulement profitables pour mieux cerner les différents facteurs d’influence du discours mais encore nécessaires car « le discours ne serait se réduire à un ensemble d’énoncés abstraitement « décontextualisés », mais constitue bien une pratique sociale, culturelle, intellectuelle et technique »[6]. Citons maintenant les ouvrages qui nous ont été utiles et décrivons les brièvement à l’attention des lecteurs.
L’Histoire générale de la presse française par Claude Bellanger et La presse en Alsace au XX siècle de Hildegard Châtellier et Monique Mombert nous ont permis de savoir quand la presse est devenue allemande et quelles ont été les mesures prises par les nazis pour soumettre ce moyen d’expression. La presse française disparaît d’Alsace-Lorraine dès 1940 et une presse germanisée apparaît dès juillet-août 1940. La langue française est proscrite et les journaux sont soit supprimés soit remplacés par des feuilles allemandes[7].
Les Saisons d’Alsace et L’Alsace-Lorraine pendant la guerre 1939-1945 de Pierre Rigoulot d’une part et La grande histoire des Français sous l’Occupation d’Henri Amouroux ainsi que La France contemporaine dirigée par le même auteur d’autre part, nous ont en outre apporté beaucoup d’informations sur le contexte régional alsacien pendant l’Occupation allemande.
Le viol des foules par la propagande politique de Serge Tchakhotine nous a appris les rudiments de la psychologie sociale et du fonctionnement des réflexes automatiques mettant en lumière l’importance de la répétition inhabituelle de certains termes. Fréquence accentuée en Alsace puisqu’elle doit rattraper le « retard » en terme de propagande qu’elle a par rapport l’Allemagne. Le manuel de Christian Baylon et Paul Fabre intitulé Initiation à la linguistique nous a permis de voir avec plus d’acuité l’aspect implicite de nombreux signes linguistiques et techniques de propagande.
Nous allons, avant toute étude, brosser les spécificités géographiques ainsi qu’un tableau des évènements qui ont ponctués la vie en Alsace à cette époque puis, énoncer les analogies culturelles entre Allemands et Alsaciens pour mieux comprendre l’influence de ces éléments sur le discours étudié. A ces grilles d’analyse[8], il faudra ajouter les subjectivités des personnalités en puissance dans le domaine politique et au sein des SNN. Cette variabilité, provenant du fait que le discours est un outil de propagande malléable qui s’adapte à tous les changements qu’un état de guerre fasciste implique, constitue son identité[9].
A ce propos nous tenons à préciser que compte tenu du très grand nombre de facteurs d’influence et des diverses techniques d’analyse, nous avons choisi de présenter les deux exemples « Communauté » et « Travail » de façon différente. Ce sont les influences des contextes militaire, administratif et politique qui seront tenu en compte dans le cas de l’étude des lexèmes[10] du groupe « Arbeit » et ceux des enjeux subjectifs et sociaux pour ceux du groupe « Gemeinschaft ». De plus, nous en avons profité pour présenter deux tendances différentes prises par ces groupes de lexèmes. Dans le premier cas, après avoir observé que le groupe « Communauté » apparaît avec une fréquence supérieure à la moyenne, c’est avec un programme lexicométrique basé sur des calculs statistiques que nous avons décidé de l’analyser. Dans le second cas, il s’agit de la formation de « chaînes lexicales » qui se constituent et varient au gré de l’évolution du contexte et des obstacles rencontrés dans un univers fasciste très restrictif. Voici maintenant quelques indications concernant la géographie, l’histoire, la culture et la presse alsaciennes qui donneront aux lecteurs des repères utiles pour mieux comprendre la suite.
[1] Lexico 3 d’André Salem
[2] Dominique Maingenau, L’analyse du discours, p . 9, 10, 14, 18 et 25.
[3] Dominique Maingenau, L’analyse du discours, p . 25.
[4] Dominique Maingenau, L’analyse du discours, p . 48.
[5] Dominique Maingenau, L’analyse du discours, p . 11.
[6] Paveau et Sarfati, Les grandes théories e la linguistique, p. 200.
[7] Bellanger Claude, Histoire générale de la presse française de 1940 à 1958.
[8] Dominique Maingenau, L’analyse du discours, p . 40.
[9] Dominique Maingenau, L’analyse du discours, p . 18.
[10] Modèle virtuel, antérieur à la manifestation dans le discours. Dominique Maingenau, L’analyse du discours, p . 40.

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